Ce dimanche 15 septembre, Revel organisait un meeting aérien. Un truc avec des avions qui volent, qui font du bruit en passant devant le public pour faire coucou et le tout dans des lignes pas trop droites pour ne pas s'ennuyer. Un truc chouette.
Comme à la Montagne Noire on s'y connaît un peu en patrimoine aéronautique local, nous avons été invités à participer. VVMN y avait un stand, avec un planeur exposé pour expliquer au gens qu'il n'y a pas de moteur mais que oui ça vole très bien quand même. Et l'APPARAT y était conviée pour une démo en vol d'aéronefs de collection, en l’occurrence le NC 859 et le Slingsby T21. Mais comment ça se passe un meeting quand on est pilote ? Voyons ça ensemble.
Déjà, il faut des pilotes qualifiés. Pour le NC, nous avons Bernard, momument patrimonial à lui tout seul, et toujours pilote de qualité. Indiscutable. Pour le T21 la première contrainte qui est venue n'avait rien à voir avec les qualités de pilotage. La question était plutôt... le poids. En effet à Revel il n'y a que la piste en dur d'utilisable, et le T21 est posé sur son patin à l'arrêt. Cela signifie qu'à la mise en puissance du remorqueur, et surtout à la décélération en fin d'atterrissage, le patin frotte. Et un patin qui frotte, ça s’abîme, ça se raye, c'est moche et ça fait râler le mécano. La question de l'équipage a donc été d'abord posée dans le but d'avoir un équipage léger. Coup de bol, je ne suis pas lourd. En plus je suis lâché T21 (c'est mieux) et je suis instructeur ce qui a don de rassurer les autorités administratives qui contrôlent les papiers avant le meeting.
Et des papiers il en faut. Une fiche par machine, une fiche par pilote, et ce n'est que AVANT le meeting. Durant le meeting, il y a re-vérification des papiers de l'aéronef et du pilote, et jusque dans les petites lignes en bas du contrat d'assurance. Rien n'échappe au Directeur des Vols. Ceci dit nous sommes en règle, il ne nous manque qu'un papier que nous avons bien mais que nous avons oublié. Il suffira de l'apporter demain pour le briefing du matin avant meeting.
La veille du meeting, il faut répéter. Si, c'est mieux, ça fait professionnel, ça permet de se remettre les gestes en tête. Surtout quand comme moi, c'est le premier meeting, et que les gestes je ne les ai pas du tout en tête parce que je ne les ai jamais faits. Ceci dit il n'y a rien de révolutionnaire. La présentation prévoit une arrivée directe de la Montagne Noire, un retour au sol, une remontée verticale terrain, puis largage du câble, atterrissage de l'avion, atterrissage du planeur. Donc beaucoup de temps derrière le remorqueur. Et pour ceux qui ont déjà fait du T21, vous savez que le remorqué n'est pas la partie la plus agréable du vol.
Avouons-le : la répétition a été utile. Au premier essai de retour au sol, j'ai fait comme dans la procédure, et je suis descendu sous le souffle du remorquer avec tous les aérofreins dehors. Pas de bol, je n'ai jamais trouvé le souffle du remorqueur. Du coup j'ai ajusté ma position au jugé, et le jugé était trop bas. Dans le NC, Bernard nous indiquait de remonter à la radio. Mais dans un planeur cabriolet qui vole à plus de 100 km/h, la radio est peu audible. Nous avons donc mis du temps à comprendre la position délicate dans laquelle était Bernard. Mais nous avons compris, quand même, et nous sommes rentrés au terrain de départ pour nous remettre au point au sol, avec un nouveau briefing plus détaillé.
Répétition en 03 à la Montagne Noire (LFMG)
Briefing refait, nous avons fait un premier retour au sol en local à la Montagne Noire, et comme il s'est révélé concluant, nous sommes partis faire notre démo de répétition à Revel. Répétition sans souci, bien comme prévu. Seul point à améliorer selon le Directeur des Vols : le planeur aurait pu se poser plus long. Il est vrai que pour cette première fois, j'avais pris un point d'aboutissement au premier tiers de piste, histoire de voir comment ça se passe. Et (toujours selon le DV), si je peux arriver un peu plus vite et avec moins d'AF histoire de survoler la piste en effet de sol, c'est encore plus beau et ça plaît au public. Noté. Nous sommes repartis peu après pour finir la journée à la Montagne. Nous étions samedi midi, et il restait des thermiques à exploiter, mais ça c'est du côté VVMN.
Le dimanche matin, nous sommes allés au briefing à Revel. Toute une salle pleine de pilotes qui ont l'habitude d'assister à ce genre de réunion, des pilotes avec des milliers d'heures de vol. Moi dans mon coin à mon premier meeting, j'étais comme le mec qui prend un avion de ligne pour la première fois : j'écoutais les consignes de sécurité. Alors que les autres hochaient de la tête d'un air de "on me l'a déjà dit 100 fois".
Après le briefing : le café et les croissants. Puis une petite pause, puis le repas du midi. C'est ça qui est sympa quand on est un pilote, tout le monde vous traite bien. Attention à ne pas en abuser, risque de grosse tête. Une fois la collation déjeunatoire prise, nous sommes remontés à la Montagne Noire pour préparer nos machines. Le programme nous annonçait à 14h, ce qui signifiait pour nous d'être prêts à 13h45, pour un décollage entre 13h50 et 13h55. Quitte à attendre en cercles aux abords de l’aérodrome de Revel, hors de la zone d'évolution des démonstrations en cours.
Mais nous avons des vieilles machines. Et elles sont capricieuses. Pour preuve, le NC a peiné à démarrer, malgré l'aide de 4 personnes qui ont généreusement abandonné leur pique-nique pour tourner la manivelle. Il a fallu finalement soulever un peu la queue de l'avion (une histoire de noix de démarreur, pas facile à expliquer) pour que ça parte. Alignés en piste dans le T21, Christophe et moi étions prêts. Christophe ? Ah oui c'est vrai j'ai oublié.
Le T21 est un appareil qui se pilote à deux. Enfin surtout pour une démo de ce type. En effet, tenir le vol remorqué demande pas mal d'énergie sur le manche, et parfois les deux mains. Tenir le vol remorqué en retour au sol nécessite de plus de tenir les aréofreins. Il faut donc une main sur la poignée bleue, et une ou deux mains sur le manche. Ce n'est pas facile, mais ça se fait (ça muscle un peu). Mais ajoutez à cela l'utilisation de la radio portable et vous verrez que c'est impossible. En plus, dans le T21 il y a un klaxon, une pagaie et il faut bien un opérateur pour les manier. Enfin, dans un biplace côte à côté, il vaut mieux être deux pour équilibrer la machine en latéral. Pour toutes ces raison, Christophe a eu l'autorisation de voler dans le T21 lors de la démo, en qualité de mécano-radio et opérateur klaxon-pagaie. Un rôle important.
En piste donc, dans le planeur, nous étions prêts. Et nous voyions passer les minutes, et l'heure approchait, et on se demandait bien ce qui pouvait se passer devant le hangar de l'APPARAT. Tout à coup le NC est apparu à l'horizon, et c'est là que je me suis rendu compte que, palsembleu, nous avions omis le câble de remorquage. L'habitude du midour de VVMN avec son enrouleur et câble intégré. Un appel au pilote de la golfette la plus proche, et celui-ci est parti à toute berzingue chercher le fameux câble. A toute berzingue de golfette. A son retour, il a fallu déplier le câble, et défaire les noeuds qui s'y étaient formé durant a nuit. Ou alors il avait été mal plié.
Et pendant ce temps, puisque nous étions déjà sur la fréquence de Revel, nous entendions l'appel du Directeur de Vols : "AC, tu es sur la fréquence ?". Réponse de Bernard, pas de signe qu'ils l'ont reçu. Un peu de stress. Allaient-ils nous annuler s'ils ne nous entendaient pas ?
On voit bien les Pyrénées vous ne trouvez pas ?
Le câble enfin tendu, je fis lever l'aile, non sans signaler au teneur d'aile qu'il allait devoir courir longtemps. Ah oui, ça aussi j'ai oublié : ce dimanche, c'était vent d'Autan. Un petit vent d'Autan certes, mais suffisant pour déventer les gouvernes du planeur qui du coup n'aurait pas d'efficacité au début du roulage. Et en effet, après avoir vu le nez partir à droite, nous vîmes l'aile gauche tomber au sol pour se relever alors que le nez partait à gauche... La main sur la poignée jaune, je corrigeais tout ça et nous prîmes enfin l'air. Pfiouh. Juste à temps d'ailleurs pour nous signaler à Revel. A leur réponse, nous comprîmes qu'ils n'étaient pas enchantés par notre retard, mais que pour 5 minutes ils n'allaient pas nous refuser. Je les remercie ici de leur indulgence.
Approche finale en 31 à Revel-Montgey (LFIR)
La démo se déroula sans heurt. Retour au sol dans les règles, remontée à la verticale un peu plus longue que la veille, mais Bernard centrait les pompes avec le NC donc ça montait correctement. Largage un peu en dessous des 700m demandés, mais de toute façon c'était bien suffisant pour que le NC largue le câble et se pose avant que Christophe et moi ne nous mettions en finale. Le NC étant juste devant moi sur la piste, le contrôleur me demanda de me préparer à une remise des gaz au cas où. Je ris.
Sous les hourras de la foule en délire (ou presque), nous avons dégagé le planeur et le remorqueur, afin de pouvoir enfin ôter nos combinaisons de vol qui font bien sur les photos mais qui tiennent sacrément chaud. Le reste de la journée fut occupé à regarder d'autres avions, en l'air ou au sol, et à profiter de cette belle journée.
Cette expérience de premier meeting s'est bien déroulée, nous n'avons rien cassé, nous n'avons pas eu peur. Si on me le re-propose il est possible que j'accepte.
Retour à la maison en fin de journée