Si le Storch était notre raison de venir travailler à l’APPARAT ce samedi, ce n’est finalement pas lui qui nous a le plus occupés.
Arrivés en cours de matinée, les volontaires pour travailler sur la restauration e l’avion étaient plutôt nombreux pour un samedi matin, avec 4 personnes. Des tâches simples les attendaient, en patientant pour les tâches plus délicates à superviser par le mécano l’après-midi.
Ainsi ce furent des vis qui furent démontées, nettoyées et resserrées, des câbles électriques qui furent munis de cosses de batterie, et des galets qui furent rassemblés et préparés en vue de leur installation.
Puis casse-croûte. La météo grisâtre et n’incitait pas au pique-nique extérieur. Le vent du nord ouest permettait de sortir les machines du hangar tout en permettant des vols de pente au club de vol à voile.
Puis avec les bras disponibles, nous sortîmes le NC, le Zlin et le T21, en vue de sortir également le Storch. Le but était de pouvoir faire le plein de carburant dans un espace dégagé et aéré en cas de fuite.
Opportunité saisie par François et quelques acolytes pour peser le Spalinger. Avec un peu d’espace dégagé par la sortie des autres machines, la pesée se fit bien, approchant encore le Spal de sa mise en vol prévue pour mi-mai.
Tandis que les galets des tringles d’ailerons étaient installés, la jauge a essence étaient mise en place, munie de son joint d’étanchéité. La citerne de VVMN était pleine après un aller-retour le matin, et proche de l’avion prête à remplir son office et le réservoir intérieur gauche.
C’est là que se vent forcit.
Le grain visible depuis un moment à l’horizon n’était pas encore là, mais le vent oui. La toile sur l’aile du Storch commençait à flotter un peu fort. C’était le bon moment pour rentrer les machines avant la pluie.
Trop tard. Depuis le Storch, je regarde vers le T21 et je le vois qui commence à se soulever de 20 centimètres, doucement. Puis il prend de l’incidence et arrive à 1 m de haut, en accélérant la montée. Personne ne dit rien. Et soudain, dans un ultime sursaut, il se lève de toute sa hauteur le long du cyprès qui est derrière lui, au bord de la dalle le long de la route.
Quelques secondes de stupeur. Il est possible qu’un ou deux jurons sortent mais l’ambiance est plutôt silencieuse. Va-t-il rester en place ?
Le vent, retombe. Le T21 non. Posé sur la profondeur gauche et le bout d’aile gauche, il semble bien à sa place. Il faut dire que le poids de la machine se trouve en grande partie dans les ailes qui sont ici du côté de l’arbre.
Et maintenant ?
Si on le tire avec une corde vers la bas, il va tomber de toute sa masse et se fracasser. Rien de sera récupérable alors que dans sa position, on peut espérer faire revoler le T21 après quelques travaux. Il faudrait donc une grue. Qui a une grue ?
Je connais Pierre qui peut en avoir une, mais au téléphone il me dit qu’il ne pourra venir que demain midi. C’est loin demain midi, avec toute une nuit à passer au vent et à la pluie.
Tentative chez les pompiers qui sans surprise me disent que puisqu’il n’y a aucun blessé ils se déplaceront pas leur grande échelle. Peut-être aurais-je dû dire qu’il y avait un chaton dans le T21.
Sans solution immédiate, la solution intermédiaire est de s’assurer qu’il ne retombe pas. Les acrobates arrivent à monter dans l’arbre pour passer des cordes autour des ailes et les attacher au tronc du cyprès. Ce n’est pas complètement satisfaisant mais ça stabilise la situation, autant pour le planeur que pour les personnes qui commencent de plus en plus à prendre confiance en s’aventurant en dessous de la machine.
Sur la route en contrebas, des voitures commencent à s’arrêter et à prendre des photos. La nouvelle va se répandre assez vite. Côté vol à voile, le pilote du LS4 appelle la tour pour signaler que le T21 est dans une position inhabituelle. La personne à la tour ne comprendra pas vraiment avant de venir voir en vrai. En piste, ils n’ont pas vu de telles bourrasques, il y a dû avoir un phénomène de vent très local avec un effet venturi entre le hangar et la cantine.
Comme l’effort arrière est supporté uniquement sur la demi-profondeur gauche, le fuselage subit une torsion qui n’est pas bonne et qu’il ne faudrait pas amplifier. Nous démontons donc la gouverne de symétrie pour placer un tréteau qui fait reposer le fuselage sur son axe, ou en tout cas qui limite l’effort supporté par la profondeur.
J’appelle Bernard que je sais être sur la route du retour après 3 semaines d’absence. Je lui donne la mauvaise nouvelle et il répond qu’il passera sans doute à la Montagne avant de passer chez lui. Je n’ai pas trop de doute quand à son « probablement ».
Le T21 est toujours dans son arbre et au moment où nous en avons marre de la regarder et que la meilleure chose à faire est d’aller boire une bière pour « arroser » ça, le chef arrive.
Avec le chef, tout son réseau de copains, c’est assez impressionnant. En quelques minutes, le réseau mobile pourtant faiblard de la Montagne Noire transmet des informations dans de multiples directions : services municipaux, loueurs, agriculteurs, copain qui connaît un voisin qui connaît un type qui a une grue… De nombreuses impasses, une vraie solution à la fin.
Didier viendra avec sont camion dans 45 minutes.
Il est 19h30, la nuit n’est pas encore là et de nombreux observateurs sont rentrés manger, dormir, au chaud. Il reste Bernard, Florian et moi-même. Ces 45 minutes d’attente se font en pique-nique dans le hangar. Il y a des noix de cajou, du pain, des saucisses de différentes origines. Même Ursa a droit à sa soupe.
20h15, Didier arrive avec son camion dont la grue doit pouvoir atteindre les sangles qui passent autour des attaches d’ailes avant. La nuit commence à tomber, la pluie aussi. Didier met en place le camion au bon endroit. La masse du T21 n’étant pas importante (290 Kg), il peut ajouter la rallonge en bout de grue. Florian grimpe dans l’arbre pour passer le crochet dans une des sangles. Je grimpe pour défaire les cordes de sécurité attachées autours des ailes.
Quand tout est en place, nous mettons en tension. Normalement, la position de la sangle va aider le planeur à pendre à peu près à l’horizontale. Il y a une équipe à la queue, une équipe au bout d’aile. Et c’est parti.
Lentement, avec toute la douceur que le pilote de la grue sait mettre dans la machine, le T21 reprend son envol à un mètre de haut. Puis il commence à pivoter autour du camion quand la grue l’y déplace.
Avec de la hauteur sous le planeur, l’équipe de queue peut commencer à remettre de l’horizontalité longitudinale, et l’équipe d’aile fait de même en latéral. La grue abaisse le planeur qui vient se poser doucement et sûrement sur sa roue.
La descente n’a rien abimé d’important, aucun choc particulier, aucune contrainte sur une pièce de structure. Seule écueil : le bras de la grue a enfoncé le nez du T21. Un peu de menuiserie et il n’y paraîtra plus.
De toute façon, il y a du travail sur la machine, avec une inspection du fuselage qui a été sous contrainte quand il était à la verticale, notamment au niveau de la profondeur. Les trous dans la toile et le bois enfoncé demandent aussi des heures de travail et cela ne fait jamais plaisir. Mais il reste un bon espoir que le planeur puisse un jour retrouver les airs, cette fois avec un pilote à bord.
Il est 21h30, de l’amour propre et du bois ont été abimés mais ça se répare. Personne n’a été blessé, les personnes présentes ont su réagir sans paniquer et avec sans froid. Cette expérience n’est pas de celle qu’on veut renouveler, mais elle reste intéressante à vivre.
Pour rappel, la position préconisée pour un planeur dehors quand il y a du vent est indiquée dans la phase 1 du bouquin bleu : vent ¾ arrière, aile basse côté vent tenue par des pneus ou des sacs. Ne pas oublier l’éclisse pour que la symétrie ne batte pas. Avec un peu plus d'expérience on peut ajouter de bloquer les gouvernes manche avant et de bloquer la queue pour empêcher l'effet girouette.
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